Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

18 mars 2006

Vivant et virtuel

Londres, jeudi 24/12/2015, 01:35:53

Le garçon approchant de leur table, Blaise interrompt son ami Peter :

- Que prends-tu ?
- Un citron pressé.
- Deux…, ajoute Blaise qui laisse le garçon s’éloigner avant de reprendre: Un peu simple!… Les constructions virtuelles actuelles sont aussi globales, nous sommes très loin des engins de la fin du vingtième siècle qui découpaient le corps en mains, regards, pénis artificiels et l’instrumentaient en conséquence. Maintenant nous utilisons des combinaisons à immersion totale qui donnent des illusions parfaites.
- Tu reviens à tes erreurs… donc l’amour, la passion, le sentiment religieux, etc.
- Mais non ! Ce sont deux mondes étanches, je parle de mondes physiques, toi de spiritualité!
- D’esprits animaux et d’union des âmes… On y revient! Tu es pourtant matérialiste! Du moins c’est ce que tu affirmes!
- Tu mets sur le même plan systèmes physiques et systèmes biologiques, l’inerte et le vivant. Il y a des siècles, des millénaires que l’on en débat, la contradiction homme-créature-divine inconnaissable à l’esprit humain et l’homme-machine ne date pas d’aujourd’hui. Ce sont des systèmes radicalement différents. Un exemple, on sait depuis des années produire des clones du vivant mais on a, pour cela, besoin du vivant, on ne sait pas produire le vivant alors qu’on sait parfaitement produire de la matière.
- Également à partir de la matière, le coupe Peter.
- Oui, mais on ne sait pas produire du vivant à partir de la matière inerte alors que rien n’est plus facile que de produire de la matière inerte à partir du vivant!… C’est un peu confus, mais je crois qu’il y a une différence radicale.
- Plus prosaïquement, dit Peter, on peut parvenir à simuler la satisfaction d’un être vivant mais on ne parvient pas à le satisfaire. On peut faire croire à un individu, par des stimulations appropriées, par un environnement virtuel adéquat, qu’il n’a pas faim; on ne peut pas le nourrir. S’il ne mange pas, il meurt. Le vivant seul sait produire du vivant. C’est un territoire inaccessible au virtuel.
- D’accord… Le virtuel produit sur le vivant l’illusion du réel, il ne peut pas produire le vivant, donc le réel. Pour en revenir à ta provocation, l’amour est une manifestation entre vivants, non un simple phénomène physique. Les machines virtuelles, aussi perfectionnées soient-elles, sont des machines à produire du physique, non du vivant.
- Voilà pourquoi je préfère le squash réel au squash virtuel, dit Peter triomphant, je n’arrive pas à me passionner aussi pleinement dans les jeux virtuels que dans les jeux réels où l’homme et son environnement sont impliqués dans leur globalité.
- Nous sommes d’accords… À cette heure-ci, on va pas recommencer la discussion mais je crois que, sur ce terrain, tu vas trop vite. D’une part, c’est une question de culture, le virtuel de ton enfance n’était pas assez perfectionné pour te donner l’illusion du réel. Toute activité ludique est liée à une culture. Tu n’es pas acculturé au virtuel, je ne sais pas si pour John ce sera pareil.