Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

19 juillet 2006

Une quenine

Norilsk, vendredi 26/12/2015, 00:02:60

Irina n’a donc pas rêvé. Elle regarde à nouveau la liste: une fois encore, le hasard fait bien les choses. Étant une des plus éminentes spécialistes mondiales du cryptage, ce n’est pas la première fois qu’elle est consultée, à leur insu, par des partis opposés. L’essentiel est qu’aucun ne le sache. La délocalisation facilite aussi cela. Pour le reste, elle se débrouille. Elle relit les messages, tous deux proviennent d’un serveur apparemment installé à Zagorsk. Le siège de l’église orthodoxe, l’équivalent de Saint-Pierre de Rome. Tout cela fait trop de coïncidences pour que ce soit un simple hasard. Elle a comme client une des personnes qu’avec ses amis elle recherche. À elle d’en profiter…

Son problème ne relève que de la déontologie: ce Jean de Jandun veut un algorithme de cryptage inédit, trop complexe pour être ouvert. Son travail est d’en programmer. Elle en a quelques uns en réserve. Notamment un, très rapide, puissant, basé sur une suite mathématique, la Quenine — j(i)=2i (2n+1) —, appliquée à une transcription phonétique partiellement aléatoire. La clef de l’aléatoire dépend de la date et de l’heure d’émission du message — à la seconde près, toutes coordonnées dissimulées de façon invisible dans les instructions de formatage. Quelque chose de redoutable si on ne possède pas l’algorithme de transcription. Or cet algorithme, elle est seule à le posséder. Son client ne pourra être que content. En le possédant elle-même, elle ne triche pas puisqu’elle en est l’auteur. Elle s’est engagée à ne le communiquer à personne: elle ne le communiquera pas. La seule entorse à la morale qu’elle va se permettre, c’est de piéger dans les lignes compilées de son code — donc définitivement illisibles — un petit programme espion qui détournera, avant transcription, parasitant chaque envoi, tout fichier de pedrosan sur son propre serveur dans un dossier inaccessible à l’extérieur. La morale sera sauve : seul le client utilisera l’algorithme de cryptage, ses messages seront indéchiffrables… Elle-même n’aura pas à les décrypter.

Bien sûr, elle saura tout ce que fait son client, mais elle conservera ces fichiers chez elle, ne fera parvenir à ses amis que ceux qu’elle jugera importants pour leur recherche. Et comme elle sait pouvoir compter sur leur discrétion… La majeure partie de la confidentialité sera préservée. Tout cela restera entre eux, ne sera utilisé que pour le bien supérieur de l’humanité.