Boèce de Dacie
Paris, mardi 29/12/2015, 01:45:53
Il y a maintenant presque une demi-heure que Sidney est revenu dans son ancien taudis de la rue Saint-Denis. Il l’examine avec étonnement, se demande comment il a pu vivre si longtemps dans un espace aussi exigu, dans une telle crasse. L’entassement de vêtements défraîchis et sales sur une chaise aux pieds cassés, l’odeur épouvantable qui monte de l’espèce de cuvette noire qui lui tient lieu de lavabo, les râles amoureux, les disputes qui lui parviennent à travers les cloisons, tout cela lui semble appartenir à un autre monde abandonné à jamais. Il monte sur le tabouret disposé à cet effet, ouvre le vasistas étroit qui donne sur les toits de zinc, une petite neige froide, régulière, continue à tomber sans relâche, accentuant l’obscurité de la ville. Il fait très froid. Sidney referme le vasistas, s’enroule dans une couverture, se recroqueville sur son lit. L’odeur de saleté sure de la couverture lui donne presque envie de vomir. Il avait oublié ce qu’était la pauvreté et la précarité. Il regrette presque d’avoir accepté la mission dont l’a chargé le Maître Boèce de Dacie. Bien sûr, il va quitter tout cela, abandonner Paris pour Rome où un logement décent lui a été promis, mais ce brutal retour à sa vie antérieure lui est une douleur : cette nuit va lui être un calvaire. Peut-être le Maître a-t-il jugé qu’il était nécessaire.
Boèce de Dacie l’a reçu il y a un peu moins d’une heure, après sa séance d’effusion dans son costume-de-données. En lotus sur le sol, près d’une statue de Bouddha, il l’attendait dans une des pièces blanches de l’hôtel Saint-Aignan :
- Entre, Alcathe, viens t’asseoir auprès de moi… Écoute-moi !.
Alcathe obéit…