Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

09 mai 2006

Passage Brady

Paris, vendredi 25/12/2015, 06:00:00

Comme de nombreux autres lieux presque abandonnés du centre-ville, le passage Brady, coincé entre deux immeubles délabrés, est un long couloir sombre, crasseux, couvert de ce qui, autrefois, a dû être une verrière, mais dont il ne reste plus que des fragments de châssis rouillés, des trous plus ou moins bouchés par les matériaux les plus fantaisistes: cartons, sacs de plastique, plaques de tôles, couvertures immondes…

Au fil du temps, ce lieu est devenu une sorte de cour des miracles pleine d’immondices où toute une foule calamiteuse de désintégrés se retrouve pour se livrer à divers trafics. Sidney le connaît bien. Il y est souvent venu faire du troc, échanger contre d’autres les divers produits de ses vols. Aussi l’idée d’y venir avec Moéra l’inquiète. Ce n’est pas le genre d’endroit où, surtout la nuit, viennent se promener les jeunes belles femmes. Il craint un peu ce qui peut se produire. Pourtant, rien n’arrive. Pour une fois, deux groupes de jeunes gens athlétiques interdisant ses entrées, le passage Brady est étrangement désert, calme. Lorsqu’ils y entrent, un des jeunes hommes, se contentant de dire “deuxième droite”, indique à Moéra une entrée d’escalier. Moéra et Sidney s’y engagent. C’est un couloir sombre, murs lépreux, odeur d’urine, de vieille graisse, donnant sur un étroit escalier de bois aux marches bancales. Comme Sidney en connaît tant dans le centre-ville. À leur passage, deux rats, surgissent de derrière une caisse d’ordures, s’enfuient en criant.

Sidney et Moéra montent au deuxième étage. Elle frappe violemment à la porte à plusieurs reprises. Au bout d’un petit moment, un homme ouvre, visage ensommeillé. Il est jeune: vingt, vingt-cinq ans, brun, grand:

- C’que vous voulez ?

Le ton n’est pas aimable, agressif même.

- On vient discuter, dit Moéra.

Les yeux verts de l’homme jettent un éclair de haine:

- Rien à foutre de discuter, c’est pas l’heure! Qui vous envoie?
- Des amis. Laissez-nous entrer, dit calmement Moéra, ce serait mieux!
- Foutez le camp ou j’me fâche.
- Bien, d’accord, dit Moéra qui se retourne comme pour partir.