Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

10 juin 2006

Vers un état hypnotique

Paris, vendredi 25/12/2015, 17:21:19

Sidney se trouve si bien avec Moéra… Sa vie n’est pas des plus réussies. Il a si peu à perdre. Il a tellement envie d'elle. Il n’hésite pas à accepter la proposition qu'elle lui fait:

- Oui!
- Dis: je le désire.
- Je le désire !
- Attends… Réfléchis que le temps, jamais, ne va en arrière. Ton engagement est irréversible. Désormais tu es à nous comme nous sommes à toi et, tous, nous ne faisons plus qu’un. Le désires-tu?
- Je le désire!
- Viens.

Moéra prend Sidney par la main, s’engage sur la passerelle de verre, s’allonge sur le lit:

- Allonge-toi près de moi… Silence. Ne résiste pas, laisse-toi aller… Oublie-toi, abandonne-toi tout entier, offre ton corps, ton âme.

Sidney obéit. S’allonge comme Moéra sur le dos, bras et jambes écartés, corps offert à un soleil absent. Moéra prend sa main. De l’autre, elle désigne un point de la sphère au-dessus d’elle. La passerelle de verre se retire. La porte se referme. La lumière de la pièce, devenant plus douce, adoptant des nuances nacrées, parfois bleutées, parfois rosées, change insensiblement. Une musique très légère, lente, d’abord presque inaudible, se fait entendre. Des sons étranges tenant de la mélopée, du chant hypnotisant des baleines, de la respiration profonde, quelque chose entre le cri et le chant où, çà et là, se distinguent parfois comme des ombres de mots murmurés, ou plutôt émis dans un souffle. Sidney parfois croit distinguer l’un d’eux — “suis”, “je”, “je suis”, “lumière”, “salut”, “un”, “l’un” — mais l’émission des sons qui composent ce chant est si lente, si prolongée dans un souffle parfois rauque, parfois voluptueux, ou dans une aspiration profonde et retenue, qu’il ne peut parvenir à une certitude absolue. D’une très lente et intense aspiration semble surgir le son de quelque chose comme la voyelle “u”, puis, dans un long souffle qui peu à peu tend au sifflement, s’entend un son proche de “ni” s’interrompant soudain sur la rupture sèche d’une consonne, faisant penser à “té”… Peu à peu une multitude de sons, toujours en deçà de la voix, se mêlent, tantôt dans un synchronisme parfait, tantôt en canon, tantôt en dissonances arythmiques formant un fond sonore qui tout à la fois obsède et apaise, emplissant l’esprit comme du bercement primordial des vagues. Menant à l’hypnose.