Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

09 février 2007

Hypothèses criminelles

Turin, mercredi 30/12/2015, 05:09:53

Quatre autres cadavres, bien que très abîmés, étaient dans un état moins catastrophique : ceux de Claude Braffort, Antoine Depelsemeure et de deux inconnus. Eux aussi avaient subi de nombreuses morsures, mais il semblait que les chiens s’étaient moins acharnés. Les visages notamment, bien que montrant quelques traces de crocs ne portaient pas les séquelles d’autant de barbarie. Par contre les chiens semblaient s’être excités sur les mains comme si les victimes avaient tenté de se protéger de leurs morsures: les doigts étaient déchiquetés. Là encore, les empreintes digitales ne pouvaient être relevées. Quant aux causes de leurs morts, elles étaient diverses. Claude Braffort avait eu la nuque brisée; Depelsemeure et un inconnu avaient été étranglés sans doute à l’aide de lacets; le quatrième semblait avoir été noyé mais des analyses complémentaires devraient confirmer ce diagnostic.

Seul le cadavre étiqueté comme étant celui d’Ivan Maximoff n’avait pas subi trop d’atrocités. Si l’on peut dire… car il avait été frappé de plusieurs coups de poignards. Mais, mis à part quelques ecchymoses dues certainement à sa chute, il ne portait trace ni de bastonnade ni de morsure. Ses mains étaient intactes. Le docteur Chironi avait fait relever ses empreintes.

Toutes ces constatations, ces minutieux relevés de blessures, de taille, de poids, de signes particuliers divers, les descriptions orales des cas, l’enregistrement des diagnostics, ainsi que les nombreuses photos prises sous tous le angles. Tout cela, immédiatement numérisé pour être intégré dans les bases de données de la police a pris plus de deux heures.

Quand Frédéric Carruzo se connecte depuis Genève au serveur de médecine légale de Turin, le docteur Giulio Chironi vient tout juste de se recoucher. Après s’être identifié auprès du serveur, Frédéric a accès à toutes les données produites par le docteur. La description de l’état des cadavres l’atterre. Il est en effet évident que pour quatre des cinq personnes qui l’intéressent, les photos récupérées ne permettront ni de confirmer ni d’infirmer leur identité. Faute d’empreintes, les logiciels d’identification automatiques sont impuissants; ceux de reconnaissance de forme spécialisés dans les visages auront bien du mal à comparer les photos d’identité détenues par le fichier central d’Interpol avec ceux des victimes. Pour voir s’il peut quand même obtenir quelque résultat, Frédéric fait afficher la photo d’identité de David Peirse, s’oblige à la comparer à celle du cadavre qui porte son identité. Il ne trouve rien de probant. Les tailles correspondent à un centimètre près, l’apparence générale aussi… Mais rien ne permet de trancher. Après tout, il y a de fortes probabilités que ce soit le même personnage. Pour Maximoff notamment, il n’y a aucun doute: les empreintes digitales du cadavre sont celles du fichier d’Interpol. Les cheveux roux, les yeux verts sont ceux de l’étudiant russe. Pourtant Frédéric n’est pas satisfait… Il ne comprend pas le lien entre les sectes qui semble se constituer ainsi. Quand il revient à son paysage général de données, dans l’immense galaxie des sectes, Ino et Phrixos apparaissent comme des poussières d’étoiles. Rien de particulier ne les lie ni à Sarpedon ni à Ouranos… À la rigueur, il comprendrait mieux les relations d’Ouranos et de Tsalmuda : dans cet univers paranoïaque qu’il connaît bien, il imagine assez volontiers la possibilité de traîtres ou d’espions. Tsalmuda se faisant passer pour l’adepte d’un groupe afin de le surveiller, peut-être même de lui nuire. Ou alors il faut supposer que Sarpedon ne se contente pas de fédérer quatre sectes mais s’efforce d’élargir ses liens vers des groupes isolés qui pourraient se sentir menacés. Quoi qu’il en soit, rien dans les informations dont il dispose, ne permet le moindre début de certitude. Ce qui semble également étrange, et pour ainsi dire même assez suspect, c’est que les cinq personnes concernées par des avis de recherche canadiens disparaissent en même temps. Bien sûr, David Peirse avait disparu le premier et les autres quelques jours après, mais quand même… À moins que l’hypothèse du traître ne soit la bonne? Dans ce cas, ça pourrait même expliquer les assassinats de Jonak et de Sanlucar. On se trouverait en quelque sorte devant une guerre de “services secrets” infiltrés d’une secte dans l’autre. Tout ça fait quand même un peu “polar” et Frédéric ne peut se persuader que cette supposition soit juste.