Un blog de l'hyperfiction intitulée "La disparition du Général Proust" : Général Proust, Les écrits de Marc Hodges, Vie sexuelle de M H, Jean-Pierre Balpe, Un roman de Marc Hodges, Les inédits de Marc Hodges, Le journal de Charlus, Les poèmes de JPB, Le premier album photo de Marc Hodges, Le second album photo de Marc Hodges, L'album photo de JPB, Le carnet d'Oriane, Les poèmes érotiques de MH à G, Les écrits de Jean-Pierre Balpe"… Extrait du roman La Toile (ed. Cylibris)

01 mars 2007

Forums en ligne

Dickinson, mercredi 30/12/2015, 08:47:44

Sue coupe Bart.

- Bart !
- Tu n’as jamais parlé comme ça, Bart, dit Brooks d’un ton de reproche. Jusque là tu étais beaucoup plus respectueux avec le révérend Bartley qui est le directeur de conscience de notre famille. Je te prie de t’expliquer.
- Bon, d’accord, marmonne Bart, j’ai exagéré… J’aime bien le révérend Bartley, mais je trouve que ses prêches manquent de profondeur. Je ne suis pas sûr qu’il ait toujours raison, je me pose des questions.
- Que veux-tu dire, demande Sue d’un ton inquiet… Tu ne crois plus en Dieu ?
- Bien sûr que si, mais.
- Mais ? insiste Brooks.
- Je ne suis plus sûr que la religion baptiste soit dans le vrai. Je me pose des questions… Je me demande si je vais me faire baptiser plus tard.
- C’est pas possible, s’exclame Sue d’un air peiné, tu ne crois plus en la religion de tes parents ?
- Je ne sais pas… Je crois en Dieu… De plus en plus… Je pense même qu’il faudrait que je lui consacre davantage de mon temps, mais je crois que Dieu ne nous est pas totalement extérieur, que nous sommes comme des esprits orphelins assoiffés de retrouver leur famille… ou plutôt comme des cellules temporairement détachées du corps sans lequel elles ne peuvent être. Je vois Dieu comme la réunion de tous les esprits, quelque chose comme un immense trou noir dans le mouvement duquel tout doit s’engloutir pour créer un être unique.
- C’est bien ce que dit Bartley, le coupe Brooks, tu adoptes des positions hérétiques. Tu ne crois pas à un être suprême. Fais attention, Bart, tu es en train de te faire endoctriner par des sectes.

Bart a l’air très surpris de l’accusation de son père.

- Bartley ne sait pas ce qu’il dit… je ne connais aucune secte. Je n’en ai jamais rencontré une seule. Où voulez-vous que j’en ai rencontré ?
- Sur le réseau, dit Sue, mon pauvre Bart, tu es en train de te faire piéger par le réseau.
- C’est stupide, dit Bart.
- Sois poli avec ta mère, le coupe Brooks. Ce n’est pas stupide puisque c’est ce qui se passe… Où aurais-tu pris ses idées sinon ?
- Je réfléchis… Je discute.
- Avec qui, le coupe Brooks.

Bart semble hésiter :

- Ben… avec les membres des forums de philosophie que je fréquente.
- Les voilà tes sectes ! s’exclame Brooks.
- Ça n’a rien à voir… Ce sont des jeunes comme moi. On discute, c’est tout, on commente des textes de philosophes. C’est passionnant. Je n’ai pas souvent rencontré des jeunes aussi intelligents. Ça me change de Holm. Il est sympa, mais à part le foot ou la techno-wave, on peut pas dire qu’il s’intéresse à grand-chose. J’aime faire fonctionner mon esprit. C’est ce qui nous distingue de l’animal. C’est par le développement de l’esprit et la communion des intellects que l’on peut atteindre la divinité.
- Te cultiver est bien, dit Brooks d’un ton apaisant. Je ne te reproche pas ça… Je… Nous ne te reprochons d’ailleurs rien… Nous voulons simplement attirer ton attention : tu es en train de te faire endoctriner par des gens sans scrupules qui t’éloignent de ta famille et de ta religion.
- Pourquoi tu dis ça, pa, le coupe Bart d’un air chagriné. Tu ne sais même pas de quoi tu parles. T’as qu’à assister à nos discussions, tu verras bien… Personne ne m’oblige à rien !
- Fais attention, Bart, dit Sue d’un air suppliant.
- Mais à quoi, mam ? C’est pas parce qu’on discute qu’on est endoctriné.
- J’aimerais quand même que tu arrêtes de fréquenter ces groupes de philosophie, insiste sa mère.
- Pourquoi ? Bart semble profondément incrédule… On fait rien de mal. Je croyais que vous étiez heureux que je fasse fonctionner mon intelligence.
- Bien sûr, mais… commence Brooks.
- Mais quoi ?… J’ai le droit d’être intelligent si j’obéis, si je suis conforme au moule et non si j’adopte une position personnelle.
- On veut ton bien, Bart, rien d’autre.
- D’accord… Alors faites-moi confiance.
- Nous sommes inquiets, ose Sue.
- De quoi ?… Qu’est-ce que j’ai fait de mal ?
- Rien, dit Brooks… On voudrait pas que tu regrettes plus tard.