L'homme est pensé par Dieu

Dickinson, dimanche 27/12/2015, 13:28:52

La voix jeune continue à parler, lente, chaude, persuasive:

“Tu n’es rien, Bart. L’individu n’est rien. Chacun de nous n’est qu’une partie d’un troupeau. Dans les épreuves, seuls ceux qui feront une confiance absolue au Berger trouveront le chemin de la bergerie. Dieu ne connaît rien d’autre que Lui-même. Le libre arbitre n’est qu’une puissance passive mue par les nécessités du désir. Si tu te crois libre, tu t’opposes. Si tu t’opposes, tu te perds. Le péché suprême est le péché d’orgueil. L’homme ne pense pas, il est pensé par Dieu.”

Bien qu’habituée aux prêches dominicaux, Sue n’est pas experte en théologie. Celui-ci lui paraît étrange. Elle ne sait trop pourquoi, certaines expressions la dérangent. Pour elle, chaque individu est. Pour cette raison, il est responsable de lui-même comme des autres. Il a une pensée autonome, libre qui l’autorise à participer à l’Assemblée… Le pêché suprême est celui d’orgueil, mais cela ne signifie pas que chaque croyant doive abandonner toute autonomie spirituelle… Ou alors elle ne comprend pas ce qui vient d’être dit. Elle tend l’oreille, se place sous la fenêtre de Bart:

“Tout ce qui arrive sur terre dépend des forces célestes. Les orgueilleux qui prétendent le contraire sont des marionnettes manipulés par les forces du mal. La volonté humaine ne veut et ne choisit que par nécessité. Aucun individu n’existe par lui-même. Chacun de nous est partie d’un intellect unique, commun à tous les hommes. Si, au sein de cet intellect, combattent des forces opposées, Dieu les utilise pour atteindre le but qu’Il a fixé à l’univers.”

Sue trouve ça un peu confus. Elle s’inquiète… Bart se serait-il laissé prendre aux sermons d’un de ces multiples prédicateurs charlatans, parfois même hérésiarques, qui se partagent le troupeau des âmes? Elle rentre dans la maison, va chercher Brooks. Malgré ses protestations, elle l’oblige à la suivre dans le jardin:

- Écoute”, dit-elle à voix basse lui faisant signe de se taire.